This war of mine
Développé par : 11 bits.
Genre : point-and-click, survie.
Date de sortie : 2014.
Support : PC/Mac, Playstation 4, XboxOne et les tablettes pour vaches à lait.
Pogoren, Graznavia, de nos jours. Le pays est depuis peu en conflit civil entre les forces du gouvernement et des rebelles du mouvement de libération Vyseni. Marko, Pavle et Bruno comptent parmi les nombreux civils pris dans la capitale en guerre et se sont abrités dans une grande maison abandonnée.
Ensemble, ils vont devoir survivre aux batailles qui font rage le jour et aux pillards nocturnes, à l'hiver et à la perte de tout le confort matériel qui était encore récemment celui de ce pays d'Europe centrale, sans savoir combien de temps la lutte va durer.
This war of mine est un jeu que j'ai découvert il y a quelques mois lors que le célèbre Joueur du Grenier, Frédéric Molas, a commencé à publier régulièrement des Let's play narratifs basés sur le titre. Incarnant la voix de Marko, il a commencé une partie avec Pavle et Bruno, me donnant à penser qu'ils étaient les seuls personnages jouables, mais en fait, pas du tout !
Concrètement lorsqu'on commence le jeu, on se voit proposer deux scénarios différents, l'un impliquant Pavle, Bruno et Katia, et un second joué incarné par Marko, Pavle et Bruno, et tous les autres sont débloqués au fur et à mesure de la survie pour offrir jusqu'à 12 survivants différents, chacun-e doté-e de particularités uniques. Marin le bricoleur nécessite moins de matériaux pour monter des installations, Boris est une mule, lent, robuste et capable de porter plus, Pavle court très vite, Katia négocie mieux lors du troc, Zlata a meilleur moral et remonte facilement celui des autres... certains d'entre eux ont cependant des contreparties, et le but c'est de survivre au mieux en gérant les forces et faiblesses de chacun.
L'ensemble des scénarios proposés par le jeu - il est possible d'en écrire d'autres et même de créer des personnages. J'ai essayé celui avec Marko tout seul, j'vous garantis que les neuf premiers jours avec un unique survivant, c'est infernal. Pour vous faire une idée des différents personnages, celui sur la photo est le premier nommé de chaque groupe.
This war of mine est un jeu d'une apparente simplicité qui peut vite mettre en confiance le joueur, un peu à tort. Sa structure est facile à maîtriser – le jour, on construit des trucs dans l'abri, on attend les éventuelles visites de voisins venus demander de l'aide ou en offrir, de Franko le roi du troc, on se repose, on mange, on fabrique les objets nécessaires à la survie, la nuit on assigne à la surveillance de l'abri, à la collecte en ville et au repos les différents survivants – mais elle dissimule la vraie profondeur du jeu.
A l'instar de Don't Sarve, This war of mine est un jeu doté d'une grande rejouabilité : les survivants avec lesquels on commence, le moment du début de survie – été ou hiver, ce qui impose de trouver du bois de chauffage avant la mise en place de tout projet durable – les survivants qui risquent de débarquer pour quémander une place dans l'équipe et même les différents sites de collecte nocturnes – une bonne vingtaine depuis une station-service pillée jusqu'à une base militaire imprenable en passant par un supermarché, une école bombardée, un carrefour truffé de tireurs d'élite ou un hôpital en ruine – ainsi que l'intensité et la longueur de la guerre peuvent varier d'une partie à l'autre.
Du coup, il appartient au joueur de réagir sur l'instant, en fonction des besoins immédiats – que prévoit-on de fabriquer ensuite, y a-t-il des malades ou des blessés à la maison, a-t-on de la nourriture en abondance ? – comme il serait forcé de le faire dans une véritable situation de guerre, au détriment de la planification constituée par la construction d'un atelier, d'un établi à plantes, d'un petit jardin ou d'autres appareils aussi vitaux que coûteux en matériaux. Pire encore, certains lieux de collecte confinent au sport extrême.
C'est la guerre, la loi n'a plus court, la règle est dictée par les flingues, et dans ce jeu de survie, de manière vraiment intéressante, on n'est pas du côté de ceux qui les manient. Alors il n'est pas surprenant de trouver des voyous occuper une maison encore intacte malgré les bombardements, ni même de constater que les rares civils qui vivent encore dans leur propre logement ne font pas, loin de là, preuve d'hospitalité.
This war of mine intègre donc, en plus de la faim, de la maladie, des blessures et des dépendances que sont la consommation de cigarettes et de café, un système de morale avec lequel le joueur doit composer bien malgré lui. Certains survivants sont plus égoïstes ou individualistes et n'hésitent pas à voler ou tuer pour leur propre survie, et il y en a d'autres que ces actes répugnent et choquent, au point que la perte de leur humanité nuit gravement à leur moral, avec les conséquences que cela suppose – tristesse, déprime, puis risque de désertion de l'abri ou de tentative de suicide.
Le joueur contrôle tout ça, et il s'agit de réfléchir aux conséquences possibles d'un choix en fonction d'une situation donnée, généralement influencée par le background.
Première partie que j'ai terminée (et non pas première partie tout court ^^) : deux jardins, un distillateur d'alcool (à droite), un établi, un atelier à plantes pour les clopes et les médocs, et la table de travaux au max (à gauche), ce qui est indispensable. Survivre c'est du boulot X_x
En effet, outre l'histoire personnel des survivants qui est déroulée petit à petit tout au long de leur survie, dans le journal quotidien, les sites de collecte et les PNJ ont plus d'impact sur l'équipe qu'il n'y paraît au premier abord : entre ceux qui nous supplient de les aider, même si ça suppose de sacrifier quelque chose de précieux – nourriture, médicaments – maintenant pour une contrepartie ultérieure, ceux qui nous menacent de mort ou s'attaquent à l'abri, l'hiver mordant, la guerre qui fait rage, Pogoren ne fait pas bon vivre, sans parler de cette maison close dans laquelle l'exultation récompense les courageux survivants qui tuent les bandits et libèrent les femmes prostituées par leurs ravisseurs. Des fois, le bonheur, ça tient à peu de chose.
Mais, parfois, il y a quand même des moments de calme, lors desquels on oublie presque le conflit, alors qu'il faut chaud et qu'on a des livres pour se distraire, ou quelqu'un qui joue de la gratte à l'étage, voire même la radio, qu'on utilise habituellement pour avoir des nouvelles, qui diffuse du rock ou de la musique classique.
Disons-le clairement, This war of mine, jeu indépendant à l'esthétique vraiment appréciable, n'est pas le genre qui va vous réjouir, vous coller le sourire et booster votre moral. La majeure partie de l'image est dominée par le noir et le gris, un peu de blanc en hiver. Les niveaux se présentent en coupe, avec une impression de profondeur aussi discrète que réussie, et il y a juste derrière le plan où l'on joue un genre de filtre un peu flou, quel que soit le lieu ou la situation, si bien qu'on observe tout l'arrière-plan, la guerre et les bombardements avec un certain détachement, une distance imprécise. Et en plus, on est perpétuellement confronté à un conflit dangereux et meurtrier. Ouais, c'est pas vraiment un feel-good-game.
Dans la noirceur de la nuit, le moindre tas de débris ressemble à un trésor, même sur une maison éventrée par les bombes.
Cela dit, il est quand même très réussi dans son esthétique, avec son parti pris inhabituel, et la bande-son sans être très variée est plutôt agréable à entendre, avec des thèmes instrumentaux, quelques titres de rock aux sonorités très Europe centrale et des bruitages de bonne qualité. Les graphismes des bâtiments, leur utilisation dans le gameplay – par exemple pour marquer les distances et les champs de vision en collecte – sont sympa, de même que le design des survivants, dont il paraît que les portraits sont en fait ceux de l'équipe de développement. Je sais pas si c'est vrai mais en tout cas Emilia et Zlata sont super jolies.
Bref, c'est pas le jeu du millénaire, mais il vaut quand même sacrément le coup d'œil et il propose également un DLC soutenant War Child, une association de protection des orphelins de guerre, histoire de rester dans le même sujet.
En bref : petit projet sans prétention d'un studio qui mérite vraiment, par le talent qu'il déploie ici, qu'on le soutienne et qu'on en parle, This war of mine détonne vraiment par rapport à tous les jeux qui traitent de la guerre en milieu urbain et à l'encontre des civils, que ce soit par son parti pris, son point de vue ou ses enjeux. Il est rare et ô combien intéressant de placer le joueur dans une situation de survie et de conflit moral, d'autant que c'est fait de fort belle manière avec des personnages auxquels on s'attache vite malgré leurs profils variés. A essayer sans la moindre hésitation !
Le rock hongrois, ça a quand même de la classe *o*
Voir aussi :
- cet excellent article de Rue89 commentant This war of mine.
Ah bah c'est la guerre, on récupère vraiment tout ce qui peut l'être ^^
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