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1.4.22

J'ai une idée : et si on arrêtait d'encenser les auteurs nuls ?


Neogicia, tome 1 : Second éveil.

Auteur : Fabien Fournier.
Origine : France.
Nombre de livres : 3.
Date de publication : 2014.
Genre : science-fiction, fantasy.

Saly Asigar, jeune citoyenne de l'empire de Keos, en Olydri, native d'un petit village loin de la capitale de Centralis, rêve depuis toujours de devenir néogicienne. Dans son monde dominé par la magie et les Sources de la Vie et de la Mort, intégrer la minorité d'humains génétiquement modifiés et placés au service de la technologie est un choix pourtant risqué.
Lors de son injection, Saly subit logiquement des modifications, mais d'une nature inédite, qui affole les experts de l'Empire.
ALORS. Contrairement à ce que le titre semble annoncer, je vais pas incendier ce livre gratuitement, parce qu'il propose des trucs intéressants, mais vraiment, y'a aussi plein de trucs qui vont pas (du coup je vais l'incendier mais ce sera expliqué XD).

Pour commencer, il faut que je parle de l'auteur. J'ai une relation très conflictuelle avec l'univers d'Olydri et de Noob parce que, quand j'ai regardé les trois premières saisons de la série, j'ai adoré l'univers et le fait que ça se passe dans un MMORPG (j'avais même acheté et lu les trois premiers romans), mais il m'a fallu quelques années (et Noob le "film") pour me rendre compte avec retard que c'était pas très bien joué ni très bien réalisé (c'est un doux euphémisme mais le vidéaste Misterfox a fait une vidéo très intéressante sur le pseudo-film Le conseil des Trois Factions), bien qu'intéressant à suivre.

Le truc c'est que Fabien Fournier, hors de la sphère de Noob, n'est pas très connu, et même là, il est clivant. Y'a des gens qui encensent aveuglément son prétendu talent d'auteur, et ceux qui le conspuent systématiquement pour des raisons plus ou moins justifiées. En ce qui me concerne, je m'estime pas personnellement concerné, je regarde de loin les affaires qui touchent les médias généralistes - comme cette affaire de crowdfunding à 700.000€ pour le film qui a donné lieu à une escroquerie de la pire espèce - mais je trouve à la fois des intérêts et des défauts dans l'univers d'Olydri.

En fait, parmi les nombreux problèmes de Fabien Fournier, y'en a trois en particulier qui impactent visiblement son univers créatif et qui découlent l'un de l'autre : ses collaborateur·ice·s sont en fait ses proches et sa famille et ne semblent jamais critiquer (même de manière constructive) son travail, ce qui lui donne l'impression (partagée avec Alexandre Astier) d'être un véritable génie, impression de laquelle découle son apparent manque de culture.
J'veux dire, l'une des règles de base quand on crée de l'art, en particulier en termes d'écriture de romans, c'est de regarder ce que font les autres. Un bon réalisateur doit regarder plein de films, un·e bon·ne auteur·ice doit lire plein de livres. Le langage et l'écriture sont des outils, c'est en les voyant maniés correctement qu'on apprend à les utiliser au mieux. Je prétends pas être un bon auteur, Les Mille-Griffes avancent pas très vite ^^ mais avec tout ce que je lis, regarde et à quoi je joue, je sais faire la différence entre un bon et un mauvais auteur, et Fabien Fournier... bah il est pas bon quoi.
Bref, parlons de Neogicia.

Neogicia donc, qui est d'emblée prévu comme le premier tome d'une série - on va y revenir - c'est un roman de science-fiction dans un monde plein de magie - on va y revenir aussi. L'idée est intéressante, j'ai toujours adoré tout ce qui touchait aux néogiciens et à ce côté un peu steampunk intégré par le personnage d'Ivy entre le livre 2.5 (Le continent sans retour) et la saison 3 de Noob.
Le souci c'est que la science-fiction, si elle ne vise évidemment pas le réalisme, doit au moins avoir l'air crédible (j'en profite pour vous renvoyer à mon dernier article sur l'excellente série Travelers, parce qu'on est en plein dans le sujet, de la SF réaliste et humaine, voire psychologique) ; or, j'ai pu constater à la fois dans les livres Noob et dans celui-ci que dans son écriture, Fabien Fournier avait tendance à balancer des infos délirantes sans se demander si elles tiennent la route.

Pour ma part, quand j'écris Les Mille-Griffes, j'ai un genre de rituel d'écriture qui, je trouve, fonctionne bien : au moment d'écrire les décors et les paysages, je me projette à la place des personnages. J'essaie de visualiser, je me demande "si je me trouvais là, est-ce que ce serait vivable ? Est-ce que les distances et les proportions seraient acceptables, accessibles pour un humain moyen ?"
Or, Fabien Fournier, à l'évidence, ne fait pas cet effort. Il ne vérifie pas les infos qu'il balance, limite il se comporte comme un auteur de mauvaise fanfic, il balance ses fantasmes sans le moindre recul. Tenez, je vous donne un exemple : dans la série Noob, Centralis est la capitale de l'Empire, qui occupe le continent de Keos, tandis que la Coalition et à partir du livre 2.5 l'Ordre ont leurs propres continents. Très vite dans Neogicia, on nous présente le gigantisme de cette cité pleine de technologie, et le mentor de l'héroïne nous balance comme ça, posément, que la cité fait 500 000 km². La cité seule, pas l'Empire.
500 000 KM² C'EST LA SUPERFICIE DE L'ESPAGNE, BORDEL.

"un petit pays", c'est le Luxembourg, Malte ou Chypre.
Quand on évoque l'Espagne on parle déjà d'un bestiau de belle taille. Vous imaginez 15 jours de marche pour traverser Paris, Moscou, Washington ou Londres ?

Toujours dans le même genre, à un moment les personnages se rendent sur le continent de Syrial (celui de l'Ordre), pour y rejoindre la cité impériale de Dunkil à l'aise d'un glisseur (une grosse boule de métal creuse d'une capacité de 30 personnes propulsée en manipulant les courants aériens), et comme ça, pépouze, la meilleure pote de Saly Asigar lui annonce que le véhicule se déplace à 14 000 km/h.
Alors je sais pas si vous saviez mais la vitesse des véhicules aériens n'est pas calculée en kilomètres-heure, elle est indiquée en mach (d'où Mach-2, Mach-3...), mais il existe tout de même un tableau d'équivalence avec le système métrique.
...
Du coup avec le tableau en question vous pouvez constater que 14 000 km/h c'est Mach-11 ou 12, soit la vitesse de déplacement d'une station orbitale comme l'ISS ou d'un missile anti-missiles. Autant dire que pour un véhicule qui se déplacerait dans l'atmosphère avec des gens à l'intérieur C'EST COMPLÈTEMENT FUCKÉ. Je rappelle quand même que la portance et la manœuvrabilité des glisseurs repose non pas sur la combustion d'un carburant, mais sur la manipulation des courants aériens autour d'eux (ils glissent quoi). Alors je veux bien qu'on me montre, dans la réalité, une espèce d'oiseaux capables de voler à QUATORZE MILLE KILOMÈTRES-HEURE.

Tant qu'on continue à parler distances, il n'y a probablement AUCUNE ville sur Terre qui soit à 20 000 km d'une autre. J'ai fait des recherches. Los Angeles-Téhéran (USA-Iran) c'est un peu plus de 12 000, et New York-Bangkok (USA-Thaïlande) c'est un peu moins de 14 000, par exemple.
Je rappelle qu'Olydri est une LUNE qui orbite autour de la planète Arturis.
ELLE FAIT QUELLE TAILLE EXACTEMENT CETTE LUNE ?!?

Et histoire de finir en beauté sur les dimensions délirantes pondues par l'esprit fertile de Fabien Fournier, l'Œil, le cœur de la cité de Centralis, est décrit comme un bâtiment de plus de 4000 mètres et 800 étages. Y'a pas un seul bâtiment au monde qui puisse atteindre ces proportions aberrantes, et les lois de la physique y auraient clairement leur mot à dire.

Alors je tiens à le dire clairement : mélanger de la SF et de la fantasy c'est possible, c'est arrivé assez fréquemment en littérature, cinéma et jeux vidéo (surtout jeux vidéo), et c'était même vachement intéressant entre le livre 2.5, la saison 3 et le livre 3.5, puisqu'Ivy (on revient à elle parce que c'est le seul personnage de néogicienne, qui plus est personnage principal, qu'on avait à se mettre sous la dent) avait un côté steampunk très appréciable - de fait, elle est ingénieure et fabrique plein de gadgets qu'elle utilise au combat.
D'ailleurs, l'ingénierie civile et militaire remonte à l'Antiquité, elle est à la base de la construction de ponts, d'aqueducs, de systèmes d'égouts, de fortifications..., donc injecter de la science mécanique dans un monde magique, ça aurait pu donner un truc génial - regardez Final Fantasy 9 par exemple, en plus d'être une pièce de théâtre interactive et un énorme hommage à Shakespeare, c'est aussi un jeu d'heroic fantasy avec des aéronefs à vapeur, des ingénieurs, des ouvriers et des canons.

Franchement, le design des néogiciens (enfin d'Ivy) était classe (même si on la voit pas assez bidouiller à mon goût, ce serait sympa qu'avec la montée en puissance de la guilde Noob, elle ait un ATELIER), avant que ça devienne des archétypes insipides de la SF futuriste.

Sauf qu'en Olydri, un monde dominé pendant des milliers d'années par les Sources de la Vie et de la Mort (qui sont des dieux, en gros) et avec une technologie relativement récente, les descriptions de Fabien Fournier ne tiennent pas deux secondes. Tout le développement avec les néogiciens était prometteur quand il était borné à des limites raisonnables dans le monde d'Olydri, mais là ça revient à mélanger la technologie de Star Wars et le level-design d'Harry Potter : si t'as passé des milliers d'années à tout gérer dans la vie quotidienne par la magie (dans un monde façonné par des puissances magiques, bordel !), y'a tout simplement pas les ressources matérielles et intellectuelles pour passer du Moyen Âge à l'ère numérique en quelques générations.
Le métal n'est pas présent (pour bâtir une cité de 4 putains de kilomètres de haut, vous utilisez de la ferraille ordinaire ou vous allez chercher du titane dans l'espace ?), pas plus que les moyens de production (vous avez construit combien de fonderies et flingué combien d'écosystèmes pour le sable qui a servi à construire votre cité toute en verre de l'an 3582 ?) et le personnel non plus (ils doivent être bons vos forgerons et vos ingénieurs, pour être capables de construire des vaisseaux qui se déplacent à QUATORZE MILLE PUTAINS DE KILOMÈTRES PAR HEURE).

Et perso ça m'a sorti du récit en permanence, pas moyen d'apprécier ce que je lisais tellement je croyais pas à l'univers qu'on me vendait.
Non parce qu'un autre écueil sur lequel s'écrase lamentablement Fabien Fournier, ce qui est incompréhensible quand on sait qu'il est le seul auteur (avec un peu d'aide de sa compagne Anne-Laure Jarnet) sur toute la franchise Olydri, c'est la cohérence de l'univers. Et à certains moments, c'est spectaculaire.
Quand ça concerne des personnages secondaires comme Saryahblood (princesse et future leader de l'Ordre, qui change de coupe de cheveux et de circonstances d'apparition entre le roman Noob 2.5 et Neogicia), c'est déjà un peu un souci, mais quand t'es même pas foutu de te rappeler des infos essentielles sur ton personnage principal...

Saly Asigar, dès le début du premier chapitre, littéralement sur la deuxième page du récit, indique être âgée de 20 ans (oui parce que le texte est écrit à la première personne), et on lui explique après son injection qu'elle doit étudier et faire ses preuves pendant plusieurs années pour espérer monter en grade - leur université là, Memoria, a un cycle de 5 ans, et les Teknögrades, l'élite des néogiciens, ont eux aussi cinq grades, de rang 5 à rang 1.
Dans Noob 3.5 : Les fantômes du passé, en revanche :
Bah ouais, elle était déjà au sommet de la hiérarchie deux ans avant d'avoir reçu la première injection du projet Neogicia...

Vraiment, j'le répète, loin de moi l'idée de descendre en flammes, gratuitement, ce livre, mais il cristallise un peu tout ce qui fait que j'ai une relation conflictuelle à cet univers. Non parce que l'univers d'Olydri me fascine, si un MMORPG Horizon existait j'y jouerais, je passerais mon temps entre un personnage d'élémentaliste sans spécialité et un néogicien. J'adore les personnages d'Ivy (sans blague), et d'Heimdäl, l'histoire de la faction de l'Ordre, bref, y'a des trucs vraiment intéressants, et surtout, je l'ai dit, les néogicien·ne·s, ces humains si rares et discrets, modifiés et dotés de capacités surhumaines et dont l'apparition quelque part signifie clairement qu'on arrête de déconner et qu'on passe en mode serious business. L'Empire n'envoie ses humains mutants que dans les cas extrêmes.
...
Enfin ça c'était avant Neogicia.

Parce que maintenant Fabien Fournier nous explique posément qu'être néogicien·ne ça se transmet de manière héréditaire (hein ? o_O), que les néogiciens sont carrément une race à part et qu'ils sont si nombreux que Centralis entière n'est peuplée que de néogicien·ne·s (FABIEN, BANALISER UN TRUC C'EST LE MEILLEUR MOYEN DE RÉDUIRE SA VALEUR BORDEL, TES NÉOGICIENS SONT COOLS QUAND ILS SONT QUATRE, ILS DEVIENNENT NÉGLIGEABLES QUAND ILS SONT QUATRE MILLE PUTAIN), la ville étant interdite aux Olydriens qui n'y ont de toute façon pas accès parce que le bouclier de protection est infranchissable et que la Rosaphir (le minerai qui l'alimente) émet un rayonnement mortel.
Bref, exactement l'inverse de ce qu'il disait dans la saison 3 et le livre 3.5, Les fantômes du passé, donc. Saison 3 où l'on voyait les membres de la guilde Noob, accompagnés d'Ystos le druide (je rappelle que les néogiciens présents parmi les personnages principaux sont au nombre de une, c'est Ivy), constater l'abandon de la cité technologique par les joueurs de l'Empire assiégé par la Coalition, et livre 3.5 où Keynn Lucans, l'empereur, expliquait que la société impériale reposait encore majoritairement sur les affilés aux Sources et qu'il n'était pas question de les exclure de toute façon.

On peut naturellement et facilement entrer dans Centralis sans être néogicien·ne...

...mais en fin de compte on ne peut pas sans être irradié à mort...

...mais en fait si parce que Keynn Lucans veut garder dans l'Empire des olydrien·ne·s appartenant à Lys et Ark'hen, Sources de la vie et de la mort...

Bon bref, j'arrête pas de taper sur le fond mais je vais pas y passer la journée, à un moment ça va devenir lassant pour moi et ça l'est sûrement déjà pour vous depuis un moment.
Que dire du style de Neogicia ? Bah encore une fois, c'est frustrant, parce que c'est beaucoup mieux écrit que les romans Noob du même auteur, je suis pas très fan de la focalisation interne qui a tendance à poser problème quand on veut étendre un peu la narration (Hunger Games 2 et 3 en sont l'exemple, le choix d'écrire à la première personne du point de vue de Katniss rend ces romans complètement merdiques), mais ici ça fonctionne bien, on est plongé à fond dans les sentiments, les émotions et plus tard les sensations de Saly Asigar. L'objectif est de nous faire vivre la révolution physiologique et mentale qu'elle traverse, Fabien, objectif atteint !
Ce qui nous est raconté est intéressant quand c'est du matériau original, parce que ça évite les incohérences avec ce qui a été écrit précédemment...

Gros souci par contre, certains personnages sont, au mieux, archétypaux, au pire carrément des clichés. Saly Asigar et ses potes entrent tous juste dans la vingtaine, et ils sont écrits par un type qui a quasiment le double. Et ça se voit. Ils se comportent absolument pas comme des jeunes devraient se comporter, mais plutôt comme un vieux penserait que des jeunes se comportent entre eux. Pire encore, j'ai retrouvé entre les personnages de Saly Asigar et sa nouvelle meilleure pote Loreley Borg EXACTEMENT la même dynamique qu'entre les personnages de Gaea et Golgotha dans Noob : une jeune femme posée et discrète dont la meilleure amie est une bourrine tapageuse et extravertie.
D'ailleurs, je parle pas trop de la série Noob concernant son casting parce que c'est pas utile à propos d'un livre du même univers, mais le fait que Saly Asigar ait été écrite pour être interprétée par Anne-Laure Jarnet (compagne de Fabien Fournier, qui joue Gaea dans la série) - c'est indiqué dès la préface du livre écrite par celle-ci et la comédienne a effectivement joué Saly Asigar dans Le conseil des Trois Factions - et qu'elle ressemble à Anne-Laure Jarnet en plus jeune, ça nuit gravement à l'attachement que je pouvais avoir pour le personnage, parce que je voyais plus en elle qu'un avatar de Gaea. Et je serais pas surpris une seconde si dans une éventuelle apparition dans la web-série de Loreley Borg, elle était jouée par la comédienne qui incarne Golgotha à l'écran.

Bref, les personnages sont assez variables, y'en a (les personnages secondaires) qui sont beaucoup plus intéressants que d'autres (comme Kat Flint, une néogicienne pétée de classe et plutôt attachante), le fait que Loreley soit lesbienne dans le plus grand des calmes et l'indifférence générale (comme quoi, ne pas se focaliser sur la sexualité d'un perso, c'est possible, passez le message aux homophobes), c'est assez sympa aussi, et encore une fois l'univers d'Olydri est vraiment sympa, quand il est pas décrit avec des dimensions délirantes ou des incohérences manifestes, mais y'a juste beaucoup trop de défauts qui isolés seraient tolérables, et ensemble me sortent du récit.

D'ailleurs, avant de finir, je voudrais qu'on s'arrête (enfin je vais le faire de toute façon, c'est mon blog, naméo ^^) sur un truc qui me chiffonne à propos de Fabien Fournier qu'on ne dit pas assez souvent, parce que Neogicia est très symptomatique de ça : le livre fait 284 pages, et l'élément perturbateur intervient à environ 60 pages de la fin, et est réglé quelque chose comme 25 pages plus loin.
Le schéma narratif classique est très utile pour structurer un récit, parce qu'il met en lumière les grands axes d'évolution de la narration et des personnages. Sauf qu'il a tendance à être négligé dans plein de récits, notamment chez des auteurices qui manquent d'expérience, et ça nuit souvent assez clairement aux textes proposés. Chez Fabien Fournier, ce n'est même plus rédhibitoire : c'est maladif. Ce type est un peu un anti-JK Rowling. Alors que la vieille transphobe anglaise est douée pour raconter des histoires, mais absolument pas pour poser un univers (je rappelle que j'ai écrit tout un article à ce sujet), Fabien Fournier lui, sait poser un univers, mais est incapable de structurer les récits qui s'y déroulent.

Fabien Fournier est incapable d'écrire des récits conformes au schéma narratif classique. Tout simplement. Comme le dit Misterfox à propos du Conseil des Trois Factions, c'est pas du troll, c'est vérifiable.
Après avoir sommairement exposé une situation initiale, Fabien Fournier n'ajoute généralement pas d'élément perturbateur, des péripéties s'enchaînent aléatoirement pour introduire les éléments narratifs qu'il veut présenter au public, et puis à un moment on arrive à une situation finale. Sauf que sans élément perturbateur, la résolution est au moins bancale, voire absente, et l'évolution de la narration ou des personnages ne sont pas perceptibles. Ironiquement, les seuls qui ont le droit au traitement de luxe sont ceux incarnés par Fabien Fournier et Anne-Laure Jarnet, c'est-à-dire Gaea et Fantöm dans Noob, Saly Asigar et Keynn Lucans dans Neogicia, alors que des contre-exemples évidents sont incarnés par OmegaZell et Saphir : lui, il n'évolue pas d'un iota de bout en bout, et elle, c'est une DRH exigeante qui joue les DRH exigeantes sans jamais varier dans son style.

Je crois que la blonde sur la couv' du tome 3 c'est Loreley Borg. Aucune idée de qui sont les autres (enfin à part Saly et ses cheveux rouges).

Le roman Neogicia explore les débuts de Saly Asigar dans sa carrière de néogicienne au service de l'empire. J'ai dit plus tôt dans l'article que ce roman était pensé pour être le premier d'une série sur le projet Neogicia, et ça se voit. Les trois-quarts du roman, c'est juste de l'exposition, une longue préparation du personnage principal pour une révélation de ses capacités vers la fin. Même le résumé que j'ai mis là-haut et qui se termine par "un élément perturbateur" ne couvre en réalité que les vingt premières pages parce que je savais pas à quel moment se terminait la situation initiale.

Un livre devrait être capable de se tenir tout seul, avec un début et une fin, mais c'est pas le cas des créations de Fabien Fournier. Le vidéaste Misterfox, dans sa vidéo sur Le conseil des Trois Factions, l'explique très bien à un moment : le mauvais transmedia c'est celui qui impose au public de connaître tous les récits sur tous les formats, sinon il comprend pas ce qu'il voit. Quand Saly Asigar débarque dans Le conseil des Trois Factions, si on a pas lu au moins Les fantômes du passé, voire carrément Neogicia, on sait pas qui c'est. Dans la saison 3 de Noob, quand Ivy et Couette débarquent comme membres de la guilde Noob, si on a pas lu le roman Le continent sans retour, on sait pas ce qu'elles foutent là.

Fabien Fournier n'est tout simplement pas un bon auteur parce que ses différents récits sont maladivement dépendants les uns des autres, qu'il est impossible d'en comprendre un sans avoir lu ou vu les autres, et parce que même quand on fait l'effort de suivre les différents récits comme je l'ai fait, c'est pas cohérent de l'un à l'autre. Et franchement, ça me tue, ça me fume que les gens soient aussi unanimes et aussi dithyrambiques à son égard. Il est juste pas bon, et c'est précisément parce que la communauté Noob semble incapable de reconnaître qu'il est pas bon qu'il a pu se permettre de récupérer 700 000 balles de crowdfunding pour des projets mal organisés et pas chiffrés.
Deux fois.
Le public a filé presque un million et demi à un type qui n'a jamais songé à publier un décompte précis et complet des dépenses réalisées avec l'argent du public. Ça me fume qu'on encense un type pareil.

En bref : le livre Neogicia est une frustration extrême pour moi. L'élément central de son récit - les néogiciens, ces personnages steampunk balancés dans un monde de fantasy - se mue ici en hard-SF à base de haute technologie et de transhumanisme qui à aucun moment ne concorde avec les éléments apportés par les œuvres précédentes du même univers. Le background de l'univers en question reste aussi riche et intéressant que par le passé, mais il est lessivé par des incohérences et un manque de recherche et de remise en question de la part de l'auteur qui laisse Neogicia au même niveau de médiocrité que Noob, alors qu'il y avait tellement, tellement mieux à faire avec. Dommage.

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