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5.12.18

Ça y est, Disney aussi se met à faire des chefs-d'œuvre complets, totalement pétés 😍


Casse-Noisette et les Quatre Royaumes.

Film américain de Lasse Hallström et Joe Johnston (2018) avec Mackenzie Foy, Jayden Fowora-Knight, Keira Knightley, Helen Mirren, Morgan Freeman.
Genre : conte fantastique.

Londres, la veille de Noël, au XIXème siècle. Clara Stahlbaum, jeune fille passionnée de sciences et de mécanique, rechigne à se rendre à la réception donnée par son parrain, Drosselmeyer, où sa sœur aînée et elle sont supposées accorder ses premières danses à leur père.

En effet, la famille en deuil vient de perdre Marie, la mère des enfants, mais leur a légué des présents particuliers. Clara a reçu un curieux œuf de métal ouvragé, dont la clé lui est offerte lors de la réception de Noël, dans les Quatre Royaumes.


Il y a de ça un peu plus d'un an, j'avais fait un article sur les annonces des futures sorties Disney, dans lequel ma position était plutôt claire. Les films présentés au mieux me laissaient dans une parfaite indifférence (les Star Wars j'en ai plus rien à cirer, le 7 ressemblait au 4, le 8 était meh, pour être honnête à part 3-4 séquences je l'ai oublié, et l'annonce de Solo m'intriguait jusqu'à ce que le film commence à faire parler de lui. en mal), au pire me révulsaient et me jetaient dans une lassitude agacée. Principalement parce que leur seule raison d'être était de monétiser la nostalgie des gens (Le Roi Lion, Toy Story 4, Les Indestructibles 2) ou un engagement aussi récent qu'artificiel de Disney dans la représentation des minorités (Mulan).
Et puis il y avait Casse-Noisette et les Quatre Royaumes (et Wreck-it Ralph 2, mais passons).

Dès son annonce ce film me vendait du rêve, déjà parce qu'il renoue avec ce que Disney a toujours su faire - se réapproprier des œuvres existantes - ensuite parce que CASSE-NOISETTE.
Je l'annonce ou le rappelle d'emblée parce que ça va être important pour la suite : Casse-Noisette est un ballet de Tchaïkovski composé entre 1891 et 1892 sur un conte allemand de 1816 dont ce film est librement adapté.
J'ADORE la musique savante. J'ADORE la culture musicale du XIXème siècle. J'ADORE les compositeurs russes.

Ah oui, histoire de rester dans le ton, le château est une copie conforme du Kremlin.

Bref, ce film de Disney s'intègre donc dans une continuité relativement longue, et que l'on peut faire remonter à 2005 avec la coproduction par la compagnie de Mickey d'un film tourné en Nouvelle-Zélande dans le cadre du renouveau de la fantasy au cinéma (j'en ai fait un très bon article), un certain Narnia.
Cette continuité se poursuit étrangement avec l'Alice au Pays des Merveilles de Tim Burton, qui est pertinent ici, bien qu'à chier pour une raison simple. Tim Burton ne sait faire que du Tim Burton, si le star talent (recruter de grandes célébrités pour faire le boulot de véritables interprètes de doublage) avait un équivalent dans la réalisation, Tim Burton en serait l'exemple parfait : peu importe ce qu'on lui donne à faire, il fait du Tim Burton. MAIS, Disney's Alice in Wonderland c'était surtout la réécriture d'une histoire originale version épique et grandiose, précisément ce que fait le présent film.
On pourrait même caler Oz the Great and Powerful dans cette progression éditoriale de Disney si ce film n'était pas centré sur un adulte (le Magicien d'Oz) et la préquelle d'un film vieux de 80 ans (je déconne pas, Le Magicien d'Oz avec Judy Garland c'est 1939, Captain America l'a même vu avant de partir à la guerre).

Dans notre histoire du jour (inspirée d'un conte allemand, vous noterez que tous les personnages ont des noms germaniques), Clara est donc une jeune fille en deuil et frustrée à la fois par l'absence de sa défunte mère et l'impression qu'elle ne possède rien - pas même le cadeau qui lui est directement adressé et s'avère être une énigme - pour renouer avec elle. Sa quête de la clé dorée qui ouvre le mystérieux œuf est donc une fuite en avant vers un monde qu'elle ne soupçonnait pas, où elle rencontre tour à tour le capitaine Philip Hoffmann, un soldat Casse-Noisette (c'est comme un soldat de bois mais sa tête... enfin t'as compris, le ptit frère de Clara venait juste d'en recevoir un offert par M. Drosselmeyer) et les Régent-e-s des Trois Royaumes : la Fée Dragée pour la Terre des Bonbons, Hawtorne pour la Terre des Fleurs et Shiver pour la Terre des Flocons de Neige.


Je vais pas aller plus avant dans la narration pour pas vous spoiler mais si vous avez vu Le Monde Fantastique d'Oz vous devez vous douter de ce qui se passe avec le Quatrième Royaume (c'est la merde), et si vous avez pas vu Le Monde Fantastique d'Oz MAIS RÉSOLVEZ CE PROBLÈME IMMÉDIATEMENT PARBLEU !!!
Retenez juste, sur l'écriture de l'histoire et des personnages, que j'ai ADORÉ Keira Knightley dans le rôle de la Fée Dragée, alors que c'est une comédienne que j'exècre par ailleurs (elle me gonfle dans les Pirates des Caraïbes, c'est une potiche dans Love Actually et j'ai pratiquement célébré la mort de son personnage dans Reviens-Moi). La Fée Dragée est super bien écrite, elle est EXTRÊMEMENT légère et insouciante, elle sautille, s'écrie, minaude, c'est à mourir de rire parce que par rapport au personnage de Clara ça lui donne un côté maternel que Knightley gère très bien.


L'interprète du Capitaine Hoffmann, que je connais pas par ailleurs, se débrouille très bien, il est pas ouf mais il a quelques scènes vraiment bien trouvées, notamment dans son rapport avec le Roi des Souris, et surtout Mackenzie Foy (que vous avez probablement oubliée instantanément après l'avoir vue jouer Renesmée, fille de Bella, dans Twilight 4.1 et 4.2) est TELLEMENT juste O_O
Dès le début du film, son père lui balance une réplique bien sentie façon autorité inflexible, elle lui en expédie une dans les dents, il se détourne pour aller se mettre en PLS dans un coin, elle SAIT tout de suite qu'elle a merdé, et ça se voit sur son visage, elle a un genre de mimique subtile mais très bien trouvée. Par la suite, Clara aborde différents registres liés à l'action, au danger, à l'émotion - le film traite assez largement de la transmission filiale - et son interprète est superbe ♥


Concernant la mise en scène... merde, c'est juste hallucinant, je vois pas d'autre mot.
J'ai dit que Casse-Noisette était à l'origine un conte mis en musique par un compositeur russe.
Déjà, le film commence par un plan-séquence (numérique certes, mais plan-séquence tout de même) sur le vol d'un hibou (celui de Drosselmeyer) dans Londres, et franchement des Disney pour enfants qui commencent qui commencent par des plans-séquences, voilà quoi.
Ensuite, la musique est WAW. Comme on pourrait s'y attendre, elle est magnifique, elle est très riche en composition classique - et pour cause, la BO est signée James Newton Howard - et plusieurs pièces de Tchaïkovski sont reprises dans le film, y compris ÉVIDEMMENT le thème de la Fée Dragée (mais fort joliment, avant qu'on la voie vraiment, lors de la quête de Clara pour son cadeau de Noël).


Et puis, là on attaque la partie LOURDE. La Fée Dragée explique à Clara, qui ne connaît pas les Quatre Royaumes, qu'elle devrait y faire un tour rapidement pour mieux les connaître.
Et là y'a un BALLET.
Je tiens à le formuler clairement tellement je réalise pas : il y a une séquence de BALLET dans un FILM DISNEY pour les ENFANTS. Et cette séquence est mêlée de plans représentant effectivement la tournée de Clara et des Régents dans leur domaine respectif, mais le ballet est dominant, y'a presque pas de parole (juste la Fée Dragée qui commente vite fait), tout est visuel et la danseuse est superbe.
C'est tellement hallucinant qu'on oublie presque qu'on est devant un Disney. J'vous jure après ça, j'avais oublié que c'était Mickey qui produisait, tellement y'avait rien d'enfantin ou de niais à l'écran. Dans un autre film, très sérieux, très adulte, on serait pas surpris de voir ce genre de proposition, et même dans Casse-Noisette, vu que, je rappelle, c'est adapté de PIOTR FUCKIN' ILLITCH TCHAÏKOVSKI. J'veux dire, ce mec est littéralement ce que la Russie a exporté de plus influent avec Lénine et les Kalachnikov, mais là on parle d'un Disney quand même.
Un Disney avec de la musique savante et du ballet parce que pourquoi se priver de faire un film à la confluence des arts quand l'occasion est si belle ?!?


Après je pourrais en rajouter une couche en disant que la représentation dans ce film est très intéressante parce que si le film porte le nom d'un personnage masculin, ce n'est pas lui qui est au centre (le film aurait pas pu s'appeler Clara et les Quatre Royaumes, personne sait qui elle est), ou préciser que la danseuse de ballet qu'on voit durant cette séquence est noire, et qu'elle occupe aussi le générique de fin avec un partenaire masculin, mais là... c'est bien simple, j'ai pleuré trois fois pendant ce film, tellement c'était beau, dont deux pendant cette seule séquence de ballet.


Ah oui, et puis les décors, les costumes et les effets spéciaux sont très jolis, très réussis, leur réalisme est assez bluffant, c'est coloré sans être tapageur (ce qu'avait aussi réussi à faire Oz the Great and Powerful que vous devez toujours regarder), ça correspond intelligemment à l'écriture qui veut que Clara adore la mécanique (du coup c'est plein d'engrenages et d'horlogerie), mais bon, c'est la cerise sur un énorme gâteau au ballet et à la musique savante.
Alors je sais que j'ai pas vu beaucoup de films cette année, en tout cas pas des récents, mais pour moi, ceci est le meilleur film de 2018. Les autres peuvent retenter leur chance l'an prochain face à Wreck-it Ralph 2 et Captain Marvel.


En bref : adaptation libre mais intéressante et réussie à la fois d'un conte et d'un ballet, Casse-Noisette et les Quatre Royaumes est un film magnifique et très touchant sur le deuil, la transmission, l'héritage et les souvenirs. Il est parfois triste, parfois drôle, toujours somptueux, et sa mise en scène incroyablement riche en fait un des meilleurs Disney en prises de vues réelles depuis bien longtemps. À voir sans hésiter, avec vos amis, vos enfants, tout le monde.

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