Film américain de James Gunn (2025) avec David Corenswet, Rachel Brosnahan, Nicholas Hoult, Edi Gathegi, Nathan Fillion, Skyler Gisondo.
Genre : science-fiction, super-héros.
Genre : science-fiction, super-héros.
Vu en VOST.
Metropolis, États-Unis, de nos jours. Superman, le super-héros emblématique protecteur de la paix et de la justice dans le pays et le monde, vient d'essuyer une violente défaite aux mains d'un puissant adversaire, le Marteau de Boravie. Celui-ci représente un pays autocratique allié à l'Amérique et ayant récemment tenté une invasion brutale de son fragile voisin, le Jarhanpur, attaque immédiatement arrêtée par Superman dans la controverse.
Celui-ci doit donc faire face à la fois à la rancœur politique et à la méfiance populaire, secrètement nourrie par Lex Luthor.
Après la débâcle du DC Extended Universe établi en 2013 avec Man of Steel et achevé en 2023 par Aquaman et le royaume perdu, en partie inspiré par l'esthétique de la trilogie Batman de Christopher Nolan, le studio Warner a donc débauché James Gunn pour créer un nouvel Univers Cinématique DC.
James Gunn, réalisateur au sein du Marvel Cinematic Universe, qui a préalablement lancé un ballon d'essai chez DC avec The Suicide Squad, remake plus ou moins assumé du Suicide Squad de David Ayer, de sinistre mémoire.
Sauf que James Gunn est connu, depuis des années, pour être un trublion iconoclaste qui se moque gentiment et allègrement du cinéma dominant, de Tromeo and Juliet à Super, sorte de Kick-Ass avant l'heure. Et donc, il a confirmé ce profil créatif chez Marvel avec la trilogie Les Gardiens de la Galaxie, une équipe d'anti-héros dysfonctionnels qui ne correspondent absolument pas à l'archétype du super-héros noble, vertueux et défenseur du système en place.
Parce que c'est un fait assez commun et ancien des super-héros, particulièrement marqué à partir des années 1960 qui correspondent à la multiplication des personnages dans les différentes maisons d'édition : la dimension politique des super-héros passe rarement par la contestation des gouvernements et des institutions, et quand c'est le cas, ce sont des méchants comme le mutant Eric Lennscher/Magneto ou l'anti-héros Frank Castle/Punisher (qui a un sérieux problème avec la vision états-unienne de la justice et de la police).
Le super-héros lambda lutte contre le crime à petite échelle, contre le terrorisme à grande échelle, mais rarement dans les systèmes politiques et les relations inter-étatiques.
De toute façon pour questionner les institutions politiques et les relations internationales sans être un super-vilain, il faut avoir soi-même du pouvoir politique, comme Tony Stark à la tête du SHIELD ou T'Challa et Shuri, monarques du Wakanda. Les comics de super-héros sont politiques mais ils proposent rarement une alternative politique à la république oligarchique pseudo-démocratique en vigueur en Occident.
Alors, la question a déjà été traitée au cinéma, mais rarement menée à son terme : que ce soit dans Captain America Civil War (où les Accords de Sokovie sont relégués au second plan derrière la vendetta personnelle de Tony Stark contre Bucky Barnes), ou dans Batman v Superman, où le rôle interventionniste de Superman est oublié dès qu'il faut combattre les manipulations de Lex Luthor, aucune conclusion probante n'a été énoncée par les films, les réalisateurs et les scénaristes.
Jusqu'à James Gunn.
Parce que c'est une partie du propos de The Suicide Squad que d'établir un rapport de priorité entre la mission de la Task Force X éponyme et la sécurité collective du pays de Corto Maltese, les deux entrant en conflit dès lors que les super-personnages décident d'outrepasser les ordres de l'impitoyable Amanda Waller.
Aucune surprise de ma part donc, à la découverte de ce Superman. James Gunn, perfectionniste dans l'écriture et la mise en scène, a fait ce qu'il fait de mieux : il a fait ses devoirs, il a étudié à fond son sujet (d'ailleurs pour autant qu'on sache il pourrait très bien être fan de comics même en dehors de son boulot) et en a tiré les ingrédients qu'il voulait pour une histoire originale et rafraîchissante.
Plein de gens, moi le premier, se sont demandés comment il allait pouvoir écrire une histoire solide et cohérente en balançant dès son "premier" film chez DC (en tout cas le premier du projet ciné qu'il co-dirige, et pas le remake original d'un lamentable sinistre) tout un tas de personnages principaux et secondaires, supers ou non, avec la nécessité de les introduire correctement. C'est simple : il le fait pas.
Le film, dès son premier plan, m'a empli de méfiance, avec un carton certes écrit avec une certaine rythmique mais eh : ça reste un carton de texte. "Il y a trente ans, Superman est arrivé sur Terre, il y a trois ans, il s'est révélé, il y a trois mois..." etc, jusqu'au fameux plan du trailer de Superman étalé dans la neige : "il y a trois heures, il a subi sa première défaite." Splaf. En PLS en Antarctique.
Par la suite, c'est très clair, pas besoin de se prendre la tête avec plusieurs origin stories : les méta-humains sont là, point barre. Superman est devenu une normalité, le Justice Gang aussi (qui est même carrément associé à LordTech, l'entreprise de Maxwell Lord), Clark Kent est déjà pleinement intégré au Daily Planet et comme dirait la chanson, "tout le monde est là, même ceux qu'on attend pas, la Playmate du mois, Miss Tchatcha..." pardon, je veux dire, Teschmacher.
J'ai toujours trouvé inutile et un peu vaniteux que le Lex Luthor des vieux films Superman se balade en permanence avec une jolie poupée stupide, bah Eve Teschmacher, elle est là aussi, chez James Gunn, et même qu'elle a un vrai rôle dans le récit !
Pensez donc, y'a même Cat Grant ! Mais pas la Cat Grant girlboss émancipée super cool et héroïque façon Calista Flockhart dans Supergirl (dont il est normal et légitime de tomber instantanément amoureux·se, c'est un peu sa rédemption après Ally McBeal et Harrison Ford est le mec le plus amoureux et le plus chanceux du monde), ni la Cat Grant de la série Lois et Clark qui veut se taper Clark Kent, nan, c'est la Cat Grant originelle, journaliste au Daily Planet et bonne copine de Lois avec qui elle discute de "ce mec mystérieux" avec lequel elle sort, parce que Lois et Clark ne veulent pas assumer leur relation alors que PERSONNE n'est dupe, à la fin y'a même une blague entre Perry White et Jimmy Olsen sur la durée depuis laquelle ils... nan attendez à ce moment du film c'est pas Clark, c'est Superman... ok, donc la moitié des cadres du Daily Planet savent que Lois se tape Superman, d'accord.
Enfin en tout cas, y'a plein de personnages différents et James Gunn se soucie pas spécialement de les enrichir pour écrire son histoire avec. Y'a un Green Lantern — faut savoir que les Green Lanterns, une sorte de police spatiale qui défend chaque monde, y'en a généralement un par planète, sauf sur Terre, où quelque chose comme six ou sept personnages reçoivent successivement un anneau — c'est pas Hal Jordan, le plus important et le plus profond des Green Lanterns terriens, c'est Guy Gardner, et on apprend à peu près deux trucs sur lui dans le film : d'une part, il a reçu son anneau pour protéger la Terre contre les menaces extérieures, pas pour s'impliquer politiquement entre les États, d'autre part il a reçu son anneau pour protéger la terre contre les menaces extérieures et sur un malentendu, ça peut concerner Superman.
D'ailleurs, Nathan Fillion lui donne un mélange d'autorité et d'ironie qu'il prête souvent à ses personnages et qui est toujours aussi savoureux, j'adore.
Hawkgirl, de son côté, est réduite à une simple fonction, elle n'a même pas droit (enfin pas encore, on sait jamais) à son duo dramatique avec Hawkman (pour la faire courte, ce sont des amants maudits qui sont condamnés à se réincarner à chaque mort et à mourir violemment dans chaque vie où ils se retrouvent), et les autres sont encore moins connus (Krypto le super-chien, Metamorpho, Mister Terrific et même Rick Flag Sr.), bien que servant efficacement le récit.
En fait, c'est pas parfait, certains personnages méritaient un meilleur service (bah tiens, Hawkgirl par exemple, ou l'Ingénieure, qui est carrément cheatée par moments) et un des antagonistes est creux au possible (même si c'est un peu justifié par sa nature), et le personnage d'Eve Teschmacher suscite quelques incohérences autour de Lex Luthor, mais ça ne nuit pas dramatiquement au film, je trouve.
Cela dit, l'écriture superficielle de certains personnages n'empêche pas une excellente interprétation et une bonne utilisation dans le récit. Moyen détourné de faire de l'exposition, il y a à un moment du film une séquence géniale de dialogue entre Lois et Clark, elle en mode journaliste d'investigation incisive et lui en costume de Superman, qui permet d'expliquer au public du film la position du super-héros face aux institutions et à la population de Metropolis.
De son côté, Nicholas Hoult (que je n'avais pas vu depuis les films X Men) est excellent en Lex Luthor, clairement moins bouffonesque que celui des tous premiers films, très sérieux, intelligent et manipulateur (rien à voir avec celui de Jesse Eisenberg donc), et même chargé d'émotion par moments.
J'adore leurs séquences de dialogues, elles sont parfaites pour analyser et exposer la psychologie de Lois, de Clark et leur relation partagée. Ce Superman est vachement plus réfléchi que le dieu d'Henry Cavill qui est à peu près aussi profond qu'un verre d'eau. Et en plus Clark Kent n'a jamais été un libertarien. Crétin de Zack Snyder.
Superman, puisque c'est de lui qu'il s'agit avant tout, est également très bien interprété et mis en scène. Je suis très fan de cette nouvelle version qui n'a rien à voir avec l'espèce de dieu vivant pondu par Zack Snyder. Non, là on a un Superman vulnérable, avec des faiblesses humaines et physiques, qui a besoin de ses alliés et n'a pas peur de le montrer (voire de se reposer sur eux, vu qu'il n'est pas seul à protéger la paix), qui peut se laisser dépasser par sa volonté de faire le bien (c'est un classique pour le Kryptonien, le meilleur moyen de le vaincre est de miser sur sa naïve gentillesse), au point même d'aller mettre les pieds dans une poudrière géopolitique dans laquelle on reconnaît très clairement une critique du génocide palestinien par Israël. Rien que ça.
D'ailleurs le côté "woke" du film a été un argument marketing de James Gunn et je comprends pourquoi, tellement ce film est taillé pour énerver les fascistes : au-delà de la métaphore israélienne, Superman version 2025 oppose un super-gentil parfaitement intégré dans la société états-unienne, humain jusqu'au bout des cheveux, face à un discours sécuritaire et raciste à la fois national et international (y'a pas que Luthor et les secrétaires d'État, le Netanyahou fictif étant une infâme merde aussi) clairement accusé dans ses crimes et des absurdités.
De fait, cet équilibre entre la multiplicité des personnages, humains ou non, et le style sérieux mais audacieux de James Gunn accouche en termes d'image et de mise en scène d'un spectacle très savoureux, à la fois lumineux et coloré — parce que non, toutes les adaptations de comics DC n'ont pas besoin de ressembler à la trilogie Dark Knight et les comics DC ne sont pas spécialement plus sombres que les Marvel — voire psychédélique par moments (notamment concernant deux créatures en particulier... bon disons trois avec Krypto, ce chien c'est du délire XD).
Et franchement, vous avez lu le titre de l'article, ça fait plaisir un peu de fraîcheur et d'originalité dans une adaptation de Superman, faut arrêter de traiter ce personnage avec trop de sérieux, on peut déconner avec aussi et j'ai hâte de voir ce que va faire James Gunn dans la suite de son projet DC Universe.
Cette Lois Lane est très cool mais bon, vu les précédentes au cinéma et à la télé, c'était pas bien difficile de faire mieux... J'aimerai toujours Amy Adams mais... meh.
Bon, malheureusement, en termes de musique, c'est assez négligeable, mais prévisible : ce film n'étant pas une ode au glorieux Superman qui rayonne tout là-haut au-dessus des autres personnages, je n'ai pas noté de thème musical grandiose, à part peut-être quand Superman s'envole dans un plan frontal assez classe au début, et puis ça fait une semaine que j'ai vu le film, il est plus très frais dans ma tête xD
Un petit mot pour la fin cela dit, je trouve que le film pose bien les bases d'un univers cinématographique étendu, entre les personnages déjà établis qui peuvent être enrichis (Green Lantern, Hawkgirl) et ceux qui font un petit coucou ou restent à apparaître (je suis incroyablement fan du caméo de Supergirl et j'ai hâte de voir ce qu'ils vont en faire xD).
En bref : ce Superman version James Gunn tient parfaitement les promesses qu'il fait par son existence même. Le réalisateur outsider du cinéma super-héroïque confirme sa capacité à manipuler les matériaux narratifs les plus importants et incontournables pour les adapter selon son style particulier, tout en offrant un divertissement aussi profond que plaisant. J'ai découvert ici un casting très intéressant et une esthétique très appréciable et je vous recommande chaudement ce Superman, que ce soit par envie, curiosité ou pour emmerder les fascistes et les Snyderzouzes :)
Meilleur Lex Luthor.
Je veux rien entendre c'est lui le meilleur. Même si les autres sont à chier, par défaut ça fait de cet excellent Lex Luthor le meilleur Luthor.
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