Genre : comédie policière.
Lapinville. Judy Hopps, jeune lapine, présente un spectacle scolaire qui revient sur les origines primales des animaux et l'antique rapport entre prédateurs et proies, que tous ont réussi à surmonter pour créer une société qui accepte et intègre les différences et récompense le mérite personnel.
Encouragée par ces idéaux, Judy veut intégrer la police pour devenir un modèle et améliorer le monde.
Sortie de l'académie, elle est cependant reléguée au stationnement, mais parvient bientôt, en défiant ses supérieurs, à prendre en charge une enquête de disparition.
Comme je viens de le dire sur Twitter à mon amie Erazade et comme j'en ai pris l'habitude après avoir vu Big Hero 6 et Inside Out (← ce sont des liens vers mes articles, juste à titre de rappel), je commence par le staff, parce que s'il est facile de résumer un film d'animation au studio dont il est issu, il ne faut pas oublier qu'au-delà des styles propres à Pixar, Disney, Blue Sky ou encore Dreamworks (ces derniers largement en-dessous des premiers mis à part des projets très ponctuels comme, respectivement, Epic la bataille du royaume secret et les Dragons), les réalisateurs de studios d'animation ont également des habitudes et des touches personnelles qui reviennent tout au long de leur travail.
Alors, pour ce qui est de Zootopia, Byron Howard a co-réalisé Raiponce (dans lequel il prêtait sa voix) et a réalisé et scénarisé Le mariage de Raiponce, de même que Volt, star malgré lui. Rich Moore, pour sa part, voit sa carrière dominée par Les mondes de Ralph pour Disney, qu'il a réalisé. Par contre, au scénario de ce dernier (qui est et demeure mon Disney préféré), on trouve la talentueuse Jennifer Lee qui a aussi scénarisé Frozen et donc, Zootopia. Et je conclus là-dessus en citant également Jared Bush (aucun lien avec la famille de politiciens), qui avant Zootopia avait travaillé sur... Big Hero 6, et enfin Michael Giacchino, mais lui j'en parlerai davantage bientôt, compositeur de la bande originale de Zootopia, mais aussi – on va s'en tenir à l'animation sinon on a pas fini – celles de Ratatouille, Là-haut et Inside Out.
Oui pardon, j'ai tendance à citer invariablement les titres originaux et français. Alors Inside Out c'est Vice Versa, Big Hero 6 c'est Les nouveaux héros et si vous me demandez d'identifier Frozen je vous tape.
Enfin ce qu'il faut retenir c'est qu'à l'exception de La reine des neiges qui était bien naze, on a là des gens qui ont travaillé sur les quatre ou cinq derniers et/ou meilleurs films d'animation de Disney et Pixar. Du beau monde et du talent.
Rien d'étonnant du coup à ce que la richesse d'écriture de Zootopia soit aussi incontestable. Basiquement, les personnages ne sont guère surprenants, sans être spécialement cliché, mais certains sont particulièrement bien écrits, comme par exemple Nick Wilde, l'un des deux personnages principaux, Mister Big ou encore l'adversaire principal des héros. Judy, à défaut d'être une révolution, est très attachante et l'ensemble des protagonistes est fort joliment doublé en français – même si je connais presque aucun des interprètes à l'exception de quelques rôles secondaires – l'héroïne la première.
La VO, que je n'ai pas vue, intègre de son côté des talents comme Idris Elba, Jason Bateman (Arrested Development), J.K. Simmons (le rédac' chef teigneux des Spiderman), Alan Tudyk (Firefly), Bonnie Hunt ou, du coup, Shakira – en français elle est doublée pour les dialogues et les chansons sont évidemment les siennes. Et je suis désolé mais Shakira n'est pas une gazelle, malgré l'importance de son personnage, elle est sud-américaine, c'est un magnifique jaguar. Femelle. Magnifique. Et puissant. Jaguar ♥
Bref, la narration. Donc les personnages, ça va, mais l'histoire, pfoualala, ça envoie du lourd, ça tape fort. On a tendance à dire – on ce n'est pas moi, ça concerne surtout les anti-Disney primaires qui hurlent dès qu'ils voient un film Marvel ou le dernier Star Wars – que Disney est une société américaine typique, qui lisse et aseptise tout ce qu'elle touche et qui vit confortablement dans sa bulle de niaiserie et d'innocence.
Alors je sais pas vous mais moi quand j'ai vu Big Hero 6 j'ai bien aimé les questionnements moraux et la portée que le film peut revêtir. Mais les films de super-héros ne sont pas une création de Disney. Les univers exclusivement animaliers, ils maîtrisent davantage.
On a donc affaire à une société d'où l'humain est totalement absent, et dans laquelle prédateurs et proies vivent en harmonie sans jamais s'entre-dévorer, malgré des disparités sociales évidentes et fort logiquement et joliment marquées dans l'espace urbain – tout, les bâtiments, les portes et les rues, est à l'échelle des grands, il y a des quartiers pour les petits comme les rongeurs, et il est difficile de s'y faire une place quand on est haut comme une demi-pomme. Imaginez donc l'incrédulité quand une jeune lapine décide d'être un super flic alors que son chef est un énorme taureau bourru mais sympa et ses collègues des rhinocéros renfrognés – mention spéciale au Brofist de Judy d'ailleurs ♥
Concrètement, ce modèle de l'initiative personnelle et du mérite individuel, calqué sur le modèle du fameux (et totalement factice) rêve américain, se révèle vite plus délicat que les apparences le laissent penser, et c'est bien mis en valeur par le personnage de Nick Wilde. Même dans la plus belle des utopies il y a toujours des gêneurs qui prétendent gouverner – au sens classique de contrôler par l'autorité – la société alors qu'elle roule très bien toute seule.
"Capitaine, donnez-moi un vrai travail de flic, j'ai été major de ma promo, je suis lieutenant. - Rien à battre, t'es un lapin." ^_^ J'adore ce type x)
Et c'est là que ça devient brillant. Y'a pas un seul humain dans le film. Maintenant, vous allez probablement filer au cinéma pour voir Zootopia, déjà parce que je vous l'ordonne, ensuite parce qu'il est absolument génial et mérite sacrément le coup d'œil, enfin parce que je vous ferai chassassiner si vous n'y allez pas.
Et quand vous verrez ce film, songez à l'humanité. Pas en tant qu'espèce biologique, mais en tant que groupe socio-politique. Toutes les thématiques sociales et sociétales (donc respectivement liées à l'individu et à la société, comme ça vous avez la définition de sociétal) engagées par Zootopia sont totalement cohérentes lorsqu'appliquées chez nous.
L'Antiquité et le Moyen-Âge : on vit à la dure, les forts pratiquent la prédation sur les faibles, et ce serait pas du luxe de faire évoluer tout ça vers un peu plus d'égalitarisme. Le film : les prédateurs contre les proies, puis tout le monde évolue vers une société égalitaire où vous pouvez être ce que vous voulez.
Bon, au-delà de cette remarquable écriture, on reste dans un film d'animation qui se veut drôle et qui intègre donc des tas de petites références et des clins d'œil. Comme le disent les deux réals dans un interview que je lisais juste avant le film dans le magazine d'UGC, ils ont vraiment cherché à tout dévoyer. Un animal signale que le naturisme est totalement acceptable parce que ce sont des animaux habillés qui ne sont pas naturels, on trouve des marques fictives qui font furieusement penser aux réelles, depuis le smartphone Carrot de Judy (avec une carotte mordillée au dos) au café en gobelet vert et blanc en passant par Foot Locker sur une façade.
Et puis aussi un hommage évident et magnifique au Parrain de Coppola, jusque dans la musique ♥, des films Disney parodiés en version animalière par un vendeur à la sauvette, un Muséum d'Histoire Naturelle que je soupçonne d'être truffé de références que j'ai loupées bref, visuellement ça part dans tous les sens.
Littéralement. Parce que la société de Zootopia est la plus cosmopolite que j'aie jamais vu, les grands croisant les petits, les girafes, les éléphants, les hamsters, les tigres, les loups ou les renards (y compris un fennec qui... haha, j'vais pas le dire, c'est trop marrant XD) gouvernés par Le lion et l'Agneau (enfin presque), il faut bien que les milieux naturels soient adaptés aux habitants, avec un quartier équatorial pluvieux, un quartier de banquise, un quartier désertique et j'en passe. On en a un rapide aperçu lorsque Judy est à l'académie de police, ça se déploie plus clairement par la suite et c'est beau. La séquence d'arrivée de la jeune lapine à Zootopia, en train, est certes classique, mais elle marche à chaque fois, avec des plans larges et des travellings, Shakira dans les oreilles, un plan d'ensemble sur la gare qui fait furieusement penser à la Station Centrale des Jeux de Wreck-it Ralph, j'ai adoré *__*
D'ailleurs, la bande originale est du même niveau de qualité, on est pas face à un film d'action nerveux comme Les indestructibles, c'est plutôt une enquête policière à la cool, avec un délai imparti mais moins d'angoisse, et du coup les musiques sont plus là pour raconter une histoire et souligner l'intrigue que juste l'accompagner. Après, c'est Michael Giacchino, le mec qui a décidé que des trompettes en sourdine pour exprimer le temps qui passe et la nostalgie ça marcherait dans Là-haut, son talent n'est pas exactement à remettre en question ♥
En bref : on a ici affaire à une histoire palpitante portée par des personnages très attachants et complémentaires, dans un univers cohérent qui se justifie par lui-même. Certains éléments répondent à d'autres, l'atmosphère et l'action sont judicieusement écrites pour qu'on soit happé et ne voie pas le temps passer, sans parler d'une portée sociale et sociétale extrêmement d'actualité pour un film d'animation. Clairement l'un des meilleurs Disney à mes yeux avec Les mondes de Ralph, et l'un des meilleurs animés qui soient si l'on invite Là-haut, Inside Out et WALL-E dans la partie.
"Oh mon dieu, elle est toute nue !!" XD
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