Dragon 3 : Le monde caché.
Film d'animation américain de Dreamworks Animation SKG, réalisé par Dean DeBois (2019).
Genre : aventure, fantasy.
Vu en VF.
Beurk, le fameux village viking des adorateurs de dragons. Un an après avoir perdu son père des mains du chasseur de dragons Drago Poinsanklant, Harold continue, sur l'inspiration de sa mère Valka, de libérer tous les dragons qu'il peut à l'aide de ses amis Astrid, Kognedur, Kranedur, Varech et Rustik, et surtout de son fidèle dragon Krokmou.
Mais les seigneurs de guerre héritiers de Drago, désemparés par la perte de leurs armées, décident de faire appel à un chasseur de dragons, Grimmel le Grave. Sa spécialité : les Furies Nocturnes.
Alors je tiens à préciser deux choses avant de commencer : une partie de mon propos sur ce film, notamment dans l'analyse de sa musique, sera fondée sur les Partoches du vidéaste Tyllou (un garçon charmant, prof de surcroît, qui se spécialiste dans l'analyse de la musique dans la culture pop) dédiées à Dragons et Dragons 2. Du coup je vais faire référence à des trucs qu'il dit dans ses vidéos. Si vous voulez mieux connaître ou aimer encore plus la série Dragons, je vous conseille de regarder cet épisode en deux parties, dont la première se trouve là.
D'autre part ÇA VA SPOILER. Genre beaucoup. Je vais commenter ce Dragons 3 à l'aune du propos de toute la trilogie (oui c'est une trilogie, c'était prévu depuis avant même la sortie de Dragons 2), et du coup ça va me faire dire des trucs super importants sur la narration. J'aime autant vous prévenir à l'avance.
Ne lisez donc mon article que si vous avez déjà vu le film ou si vous en avez rien à cirer d'être spoilé-e. La possibilité "j'en ai rien à cirer de Dragons" n'existe pas, c'est pas possible, alors si vous en avez rien à cirer de Dragons, FOUTEZ LE CAMP DE MON BLOG ET ALLEZ RÉFLÉCHIR À VOTRE CULTURE.
LOIN DE MOI.
Contrairement à Dragons 2, qui se déroulait 5 ans après le premier, ce troisième film se déroule donc dans la continuité directe du précédent, principalement pour mettre en scène le passage d'Harold vers l'âge adulte et surtout la responsabilité de chef. Il vient de perdre son père et c'est à lui que reviennent les choix de Beurk,et donc forcément, son action de dragonnier libérateur, avec les conséquences que ça suppose. Y'a pas eu de changement radical entre les deux films comme ce fut le cas entre Dragons 1 et 2. D'autre part, question de cohérence narrative mais c'est pas la seule occasion, j'en reparlerai, cela permet aussi d'intégrer des flashbacks de Stoïk sur l'éducation d'Harold sans sa mère, et aussi de traiter le statut d'alpha-mâle récemment acquis de Krokmou.
Le truc c'est que Beurk, présentée dès le début du premier film comme telle, c'est une île, du coup tu peux pas y installer une infinité de dragons, et ça commence à se voir. Gueulfor, le forgeron et nouveau conseiller d'Harold, s'inquiète de cette surpopulation, tandis que parallèlement le jeune chef se rappelle des légendes de marins rapportées par son père au sujet d'un Monde Caché d'où seraient originaires tous les dragons. On suppose que c'est un endroit paradisiaque et inaccessible sans dragons, du coup c'est un enjeu majeur pour le film.
Sauf que, de manière extrêmement intéressante pour la narration... ben non. C'est un enjeu certes, mais le Monde Caché est un moyen de raconter une histoire, pas la fin de celle-ci. L'histoire demeure centrée sur Harold et Krokmou, notamment parce que Grimmel est un chasseur de Furies Nocturnes (on découvre même, horreur suprême, que c'est lui qui les a exterminées), mais également parce que, du coup, il utilise une femelle de la même race (baptisée Furie Éclair dans le film).
D'ailleurs, malgré mon habitude de ne jamais voir un trailer avant de découvrir un film, j'ai pas pu échapper au fait qu'il y aurait cette femelle dans le film et je craignais qu'il y aurait une opposition entre les deux dragons, un amour maudit qui finit par triompher, et bah nan, même pas. La dragonne est seulement destinée à distraire Krokmou pour affaiblir Harold, qui est le premier objectif de Grimmel.
Concernant ce mec d'ailleurs, j'ai beaucoup aimé le fait que la trilogie Dragons se dote d'une certaine manière d'un syndrome Star Trek (en référence aux reboots de J.J. Abrams) : dans le premier film, y'a un méchant parce qu'il en faut un, mais l'enjeu c'est surtout la construction de l'équipe (Harold-Krokmou-Astrid-Rustik-Varech et les jumeaux), dans le second on a un méchant sombre et triomphant qui met les héros au plus mal, et dans le troisième film on a un méchant sinistre et dangereux, certes, mais à nouveau, le propos est centré sur les personnages principaux. C'est la raison pour laquelle à la fois Star Trek Into Darkness et Dragons 2 sont mes préférés de leur trilogie.
En plus, et bien que le personnage de Grimmel soit doublé en VF par l'excellent Féodor Atkine, je le trouve déséquilibré, y'a une séquence où il montre clairement que c'est un sadique qui adore la traque et la chasse (il s'agit en définitive d'abattre des proies, je rappelle), ce qui est une tentative de le rendre drôle, mais dans tout le reste du film il est sinistre et froidement méthodique, c'est bizarre comme mélange.
Et puis déso mais moi je trouve qu'il ressemble à l'acteur Kevin Durand, que j'ai jamais vu dans un rôle vraiment effrayant, du coup pour moi ça casse le truc.
Bref pour revenir à Dragons 3, c'est clairement le film de la maturité et cette femelle en est l'exemple le plus flagrant. Comme le dit Harold lui-même, il a passé son temps à répondre aux besoins de Beurk et aux siens propres, et cette apparition lui signale que son dragon n'est pas le dernier, qu'il peut aussi avoir des aspirations qui ne concernent pas les humains. Du coup il n'est pas du tout illogique - bien au contraire - de considérer son choix final (libérer les dragons qui, de toute façon, sont mis en danger par leur seule relation, même bienveillante, avec les humains) comme un passage à l'âge de raison : Harold devient le chef qu'on entrevoit chez Stoïk au début du 2ème film, celui qui se soucie de sa communauté avant toute autre préoccupation.
Le Monde Caché devient donc un élément de la narration parmi d'autres, une des raisons qui montrent que Krokmou a besoin de grandir à son tour et de devenir un vrai roi des dragons. En tant qu'auteur je trouve ça intéressant, de démystifier un objectif à priori légendaire (d'autant que là on est un peu dans le deus ex machina) pour l'utiliser comme moyen narratif.
En parlant de croissance et de maturité d'ailleurs, le film montre bien qu'il a grandi avec son public, ce que faisait déjà la trilogie Toy Story (y'a pas de 4. Y'aura jamais de 4. C'est une aberration de penser qu'il y aura jamais un Toy Story 4).
Les personnages de Kognedur (la fille) et Kranedur (le mec), surtout elle d'ailleurs, et celui de Varech (qui devient ici un papa célibataire) bénéficient aussi de cette évolution vers l'âge adulte. Au contraire d'Astrid, qui a reçu le traitement de luxe dès le second film (elle était déjà une adulte raisonnée, mais en tant que conscience d'Harold, c'est normal qu'elle n'ait pas grand-chose à apprendre, son rôle c'est surtout de soutenir et conseiller) et de Rustik, qui est ici un ressort comique (d'ailleurs c'est bizarre, j'ai l'impression qu'il était plus grand dans le 2 que dans le 3 ^^).
Ah oui au fait, Astrid laisse pousser ses cheveux librement, elle est toujours aussi magnifique, puissante et cool ♥
Bref, tout ça pour dire que j'ai adoré ce film (même si j'adore encore plus le second), parce que je trouve que c'est une formidable conclusion à cette excellente série d'animation ♥ En plus il se termine par un mariage qui symbolise très bien le passage à la vie adulte d'Harold - plus que jamais il devient une version améliorée de son père - et offre un charmant épilogue.
Graphiquement, comme il se doit, Dragons 3 est aussi joli que ses deux aînés même si, là encore, il n'a pas l'ampleur grandiose de Dragons 2 (ses alphas, ses pics de glace, sa volée de dragons chez Valka...). L'une des séquences les plus incroyables est celle de la découverte du Monde Caché. Alors que dans ma tête je m'étais figuré un continent sauvage et paradisiaque (il est écrit comme étant à l'ouest, donc on imagine forcément qu'il va ressembler à l'Amérique), dans les faits il ressemble à rien de ce qui était connu dans l'univers de Dragons jusque là.
Et c'est logique à tous points de vue : d'une part, vu que c'est un lieu exclusif aux dragons, ça peut pas ressembler à une terre pour les humains, d'autre part c'est accessible uniquement en volant et même au sein de ce Monde Caché on ne pas se déplacer très loin en restant au sol.
La Furie Éclair, pour sa part, est également magnifique. Mais genre VRAIMENT. D'ailleurs, c'est une interprétation personnelle, mais sa blancheur nacrée et la brillance subtile de sa peau lisse me fait penser qu'elle a peut-être reçu cette apparence en référence à la lune, là où Krokmou serait la nuit noire - et on sait que les deux fonctionnent bien ensemble.
C'est marrant parce que bon, une dragonne dans une parade amoureuse, on s'attendrait (je m'attendais !) à quelque chose de violent, furieux et dynamique, mais en fait pas du tout ! Krokmou est un chat, c'est évident depuis le début (enfin un chragon plutôt), du coup sa copine... ben c'est une chatte. Avec des expressions très subtiles, beaucoup de douceur dans le regard, une tête et des formes adoucies et un certain raffinement dans ses postures, ses mouvements... elle est ADORABLE, au-delà du fait qu'elle appartienne à la même race que Krokmou, je comprends sans hésiter pourquoi il est tombé amoureux : elle est CANON.
Du coup forcément, leurs rites amoureux sont assez élégants, et ON VOIT BIEN que Krokmou c'est un gosse qui a besoin de grandir : il sait rien ^^ au début c'est... je dirais pas que c'est l'échec critique, parce qu'on est BIEN AU-DELÀ de ça. C'est la mère de toutes les foirades, avec du fail, du ratage et du vautrage (littéralement), mais comme c'est réalisé par un gros chat, c'est à mourir de rire XD
Élément intéressant dans ce processus de séduction, les scénaristes et le réalisateur ont repris la manie créatrice de Krokmou ^^ Vous savez, dans le premier film, pour tester Harold et le laisser approcher, il prenait un arbre pour tracer des lignes et si tu marches dessus c'est pas bon ! Dans le second film, juste après avoir volé avec Valka et Cloud Jumper, son draghibou (c'est comme un dragon, mais avec l'allure d'un hibou, tout est dans le nom), Harold présentait son travail d'exploration et Krokmou se la jouait "regardez je suis un artiste" avec un pic de glace. Ben dans le 3 il recommence avec sa dulcinée, exactement pour la même raison que dans le premier film ^^
Encore un truc que le film a très bien géré de bout en bout, l'évolution du dragon, son passage d'adolescent maladroit à jeune adulte responsable entre les trois films ♥
Bon malheureusement, au sein même du film, si la musique est magnifique, je n'ai pas noté de thème marquant, y'en a pas un seul qui me soit resté en tête comme c'était le cas avec les deux premiers films. Le fait est que, dans les films Dragons, la musique n'est pas juste une illustration ou un accompagnement, elle DIT quelque chose, elle a du sens, le Partoche de Tyllou est éloquent à ce sujet, beaucoup d'évolutions dans Dragons et de portraits dans Dragons 2 sont réalisés uniquement avec la musique, mais ici, c'est pas ce que j'ai ressenti, c'est dommage.
En revanche, vers la fin du film, y'a un fait extrêmement intéressant : on sait que les deux personnages principaux avaient trois thèmes pour eux. Le thème d'Harold, le thème de Krokmou, et le thème commun qu'on entend notamment dans Test Drive. Eh bien ce thème commun - qui mêle les deux précédents - n'apparaît presque pas dans Dragons 3, pour souligner que les deux personnages s'éloignent. Et quand on l'entend clairement, distinctement, c'est au moment où... Harold est sur la Furie Éclair, manière de passer le flambeau : l'humain, l'humain en général, pas juste Harold, joue ici le rôle de trait d'union entre les dragons.
Sans les chasseurs de dragons, Krokmou n'aurait pas rencontré sa belle. Sans Harold, il n'aurait pas pu la courtiser, et toujours sans Harold, elle n'aurait pas pu sauver son chéri pour vivre avec lui. Et ça, je trouve que c'est beau ♥
En bref : Dragons 3 est une conclusion magnifique à ce qui est à mes yeux le meilleur, le plus beau et le plus intéressant univers d'animation jamais écrit pour le cinéma. Les films sont à recommander pour tous les publics, tous les âges. Ce troisième film est la consécration de tout ce qui a été raconté jusque là, sur ses personnages humains et dragons et les rapports qu'ils entretiennent. Il est beau, très bien écrit, chargé en émotions, et c'est un incontournable si vous avez vu les deux premiers.
Voir aussi :
- la vidéo Partoche de Tyllou, analyse de la bande originale des films Dragons, en deux parties, ici pour la première et là pour la seconde (qui requiert d'avoir vu la première !).
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire